François Bayrou était ce matin l’invité politique de la matinale de RTL.
Bonjour François Bayrou
Bonjour
La polémique est vive entre le gouvernement et les chefs d’entreprise. Manuel Valls déplore que le MEDEF ne soit pas à la hauteur de ses responsabilités alors que, dit-il, « le gouvernement a fait une remise de 40 milliards d’euros de charge aux entreprises. De quel côté êtes-vous ce matin, François Bayrou ? MEDEF ? Gouvernement ?
En tout cas je suis très sceptique sur ces chiffres. Ce qui est frappant dans la journée d’hier c’est que le Ministre de l’Economie, Emmanuel Macron, est allé à la radio et il a dit « Le Pacte de responsabilité est un échec ».
Mais à cause des entreprises, il a dit qu’elles ne jouent pas le jeu.
Lorsque l’on a un constat de cette gravité par le Ministre de l’Economie alors il faut aussi que le gouvernement ou l’Etat – et pas seulement ce gouvernement-ci, la succession des gouvernements précédents – s’interroge sur ce que l’on a fait, créé comme situation pour les entreprises. François Lenglet a dit quelque chose de très intéressant, il a dit qu’il y a du côté du MEDEF une défense explosive des intérêts des patrons – et c’est ressenti assez souvent de cette manière – mais pour moi, l’important c’est la défense des entreprises. Or, qu’est-ce qu’il se passe pour les entreprises ? C’est très simple : petites, grandes, moyennes, elles sont dans un labyrinthe de contraintes administratives, d’obligations, de normes, de changements perpétuels de la fiscalité et des codes sociaux. Surtout les responsables de petites et moyennes entreprises ont le sentiment que l’on n’en peut plus, que l’on n’y arrive plus et qu’ils sont constamment sous la menace de changements, de punitions, qui font que leurs entreprises sont atteintes. Et donc, de ce point de vue-là, on serait bien inspiré, au lieu de jeter des anathèmes de tout côté, d’essayer de réellement donner un cadre pour la vie des entreprises qui soit positif.
Donc vous soutenez le combat de Pierre Gattaz ? Il a raison quand on dit on ne peut plus être chef d’entreprise en France ?
Je ne suis pas du côté d’un clan.
Vous dites la même chose que Pierre Gattaz mais vous le dites dans la conclusion.
Je ne dis pas exactement cela, il y a souvent du côté du MEDEF des surenchères. Je soutiens tous ceux qui voudront donner – et je fais partie de ceux qui voudront donner – aux entreprises un cadre stable pour que ceux qui en sont les responsables aient le sentiment qu’ils ont un avenir lisible pour eux, sûr.
C’est le côté chef d’entreprise. Je voudrais juste me dire que l’aveu par Emmanuel Macron de l’échec du Pacte de responsabilité doit avoir des conséquences, c’est ce que vous voulez suggérer, François Bayrou ?
Il faut que tout cela soit repris, s’il y a un échec c’est qu’il y a des causes à cet échec. Et les causes ne sont pas seulement chez les autres, elles sont aussi chez ceux qui ont conçu – et ce sont mes premiers mots à la sortie de ces textes – une usine à gaz absolument incompréhensible pour qui que ce soit. Ce qui fait le fameux CICE dont on parle, les entreprises n’y ont pas accès. On avait instruit 11 ou 12 milliards, il y a seulement 8 ou 9 milliards qui ont été demandés, tout cela est à côté de la plaque.
Nicolas Sarkozy a été élu président de l’UMP, une bonne nouvelle ? François Bayrou ?
Je ne fais pas partie de l’UMP et donc ce n’est pas à moi de dire ce genre de choses.
Le retour de Nicolas Sarkozy est-il une bonne nouvelle ?
Il a dit hier quelque chose qui est frappant, « On est à un sommet de haine jamais atteint » quelque chose comme cela. Vous voyez, ce climat d’extraordinaire agressivité.
Vous l’avez entretenu, François Bayrou.
Je ne l’ai pas entretenu, je me suis opposé à Nicolas Sarkozy, je l’ai même écrit. Ce climat d’extrême-tension, d’agressivité, de mise en cause permanente, de vengeance, de trépignements, Nicolas Sarkozy y a participé et il y participe. Or, pour moi, la question n’est pas Nicolas Sarkozy. C’est la question de savoir si ce climat-là est bon.
Il est mauvais, c’est évident. Mais vous l’avez entretenu, c’est la vie politique.
J’ai, au contraire, plaidé toute ma vie politique pour que l’on ait des dirigeants qui soient capables de réconcilier, de fédérer, qui regardent les autres français – ceux qui ne sont pas avec soit – non pas comme des ennemis mais comme des gens avec lesquels de toute manière il faudra que l’on travaille pour redresser notre pays en grande difficulté. Ceci a été mon crédo, mon affirmation pour la prise de position pour la vie politique française.
Le retour de Nicolas Sarkozy ne facilite pas cela ? C’est ce que vous voulez dire ?
Nicolas Sarkozy, l’UMP ont le droit de faire leurs choix. Ce que je vois, c’est que la France a droit d’avoir une autre solution, un autre projet devant elle que ces rejets d’affrontements. Et donc, pour ma part, je pense que tous ceux qui ont à l’esprit l’idée d’une attitude politique différente, d’un projet politique différent, ont, eux, le devoir de réfléchir et de travailler ensemble.
Nicolas Sarkozy a parlé de vous, dimanche, sur TF1, on l’écoute juste : « Les dirigeants du MoDem ont fait l’élection de Monsieur Hollande, c’est leur choix. Mais c’est curieux de faire l’élection d’un président de gauche et après, pour être élu maire de Pau, d’appeler aux électeurs de droite ». Réponse de François Bayrou ?
Ce que Nicolas Sarkozy ne comprend pas, c’est que les électeurs, en particulier les électeurs de Pau – parce que chez nous on a une tradition démocratique ancienne, la démocratie chez nous a 1000 ans – se déterminent par eux-mêmes. Nous avons un bulletin de vote, je ne suis passé par aucun appareil politique, la liste que j’ai présenté aux Palois est une liste qui va de la droite à une partie de la gauche.
Ce qu’il vous reproche c’est de l’avoir fait battre en 2012.
Celui qui a fait battre Nicolas Sarkozy en 2012, nous le connaissons très bien, exactement, il est identifié par tout le monde. Et c’est Nicolas Sarkozy lui-même. Ce sont ces attitudes, ce sont ces choix, sa manière d’être qui ont fait que 3 ou 4 millions de Français qui n’étaient pas de gauche ont fait ce choix de l’alternance. Chaque fois qu’ils voient Nicolas Sarkozy, ce genre de vendetta, ou d’attitude dont l’agressivité est la marque, chaque fois qu’ils voient ces changements d’opinions perpétuels tous les jours simplement pour les salles que l’on a en face de soi, ils se disent que ce n’est pas cela qu’ils souhaitent pour les 5 ou 6 années qui viennent. Et donc je pense que cela nous donne une responsabilité à nous, une responsabilité importante qui est de préparer un autre avenir que cette fatalité, qui serait ainsi imposée, sans agressivité, sans acrimonie mais simplement avec l’idée que les Français ont droit à autre chose.
Vous ne serez pas candidat en 2017 ? Vous pouvez le dire sur ce plateau ?
Je ne dis rien de cet ordre parce que vous comme moi, nous sommes des citoyens et nous avons une responsabilité. Nous devrons assumer ces responsabilités aussi bien que nous le pouvons.
François Bayrou était l’invité de RTL, merci.